Le cannabis, c’est quoi?
Le cannabis est fabriqué à partir d’une plante, le chanvre indien. Son principe actif principal est le tétrahydrocannabinol (THC), substance psychoactive dont la concentration est variable suivant la variété de chanvre utilisée et la façon dont le produit est préparé. Cette substance est contenue dans la résine de la plante.
Que dit la loi?
Le cannabis est considéré par la loi comme un stupéfiant. D’après la loi du 3 mai 2003 modifiant la loi du 24 février 1921 concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes et antiseptiques, sa fabrication, sa vente, son achat et sa détention constituent une infraction et sont passibles de sanctions pénales. En cas de constat par la police, un procès-verbal est établi, communiqué au parquet et peut donner lieu à des poursuites judiciaires. Une circulaire de 2005 invite les parquets à accorder la plus faible priorité de la politique des poursuites à la détention par une personne majeure d’une petite quantité de cannabis (maximum trois grammes) en vue d’un usage personnel. Elle recommande à la police de ne dresser qu’un procès-verbal simplifié (PVS), ce qui réduit le risque de poursuite dans ce cas. Cette dérogation n’est valable que si la consommation n'est pas accompagnée de nuisances publiques ou d'usage problématique. Toutefois, le cannabis trouvé sera obligatoirement confisqué.
Qu'en est-il du cannabis "légal"?
Dans le contexte du cannabis légal, le terme cannabidiol (CBD) apparaît rapidement. Le CBD est un composant de la plante de cannabis, mais il ne provoque pas d'effets psychoactifs ou de "high" lorsqu'il est consommé seul, sans tétrahydrocannabinol (THC). Le CBD en lui-même ne crée pas de dépendance, mais il a un effet sédatif et peut également provoquer de la somnolence. La vente de produits à base de CBD sans THC (limite légale de 0,2 %) est donc en principe autorisée. Toutefois, dans la pratique, l'étiquetage des produits vendus n'est pas toujours fiable et les produits contiennent parfois plus que la quantité autorisée de THC.
Consommation de cannabis chez les travailleurs
Une enquête réalisée en 2016 auprès de plus de 5700 travailleurs belges a porté sur la consommation d'alcool et de drogues, dont le cannabis (Lambrechts et al, 2019). 7,4 % des travailleurs interrogés ont déclaré avoir consommé du cannabis au moins une fois au cours de l'année écoulée. Le cannabis, comme d'autres drogues illicites, est nettement plus consommé par les travailleurs masculins de moins de 35 ans et par les célibataires. 15,2 % des travailleurs ayant consommé du cannabis ou d'autres drogues illicites au cours de l'année écoulée en ont ressenti les effets négatifs au travail.
Le pourcentage de consommateurs de cannabis parmi les travailleurs correspond à peu près à celui de la population générale: dans l'enquête nationale sur la santé de 2018, 7 % des personnes âgées de 15 à 64 ans ont déclaré avoir consommé du cannabis au cours de l'année écoulée. Entre 2013 et 2018, la consommation de cannabis a augmenté de manière significative (de 5 à 7 %), ce qui semble indiquer que la consommation de cannabis est en hausse, en particulier dans les zones urbaines. La consommation de drogues illicites est plus fréquente chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans et les hommes (15 à 34 ans) de tous horizons.
CCT n°100: obligations des entreprises
La convention collective de travail (CCT) n°100 oblige les entreprises à mettre sur pied une politique préventive en matière d'alcool et de drogues et de l’inclure dans le règlement de travail. La politique en matière d’alcool et de drogues doit porter, entre autres, sur l’information et la formation des travailleurs, les mesures que l’employeur peut prendre si le besoin s’en fait sentir et les obligations respectives de la ligne hiérarchique, des travailleurs et des conseillers en prévention.
Pouvez-vous soumettre vos employés à un test de dépistage de la consommation de cannabis? Un employeur peut proposer des tests dans le cadre de sa politique en matière de cannabis, mais cela est soumis à des conditions strictes. Les tests médicaux ne sont autorisés que dans le cadre de la surveillance de la santé. Plus d'infos |
Addiction
L’addiction se caractérise par la dépendance, c’est-à-dire l’impossibilité répétée de contrôler un comportement et la poursuite de ce comportement en dépit des conséquences négatives. D’après les spécialistes, si la plupart des consommateurs de cannabis ne connaissent pas de problèmes de dépendance, celle-ci peut s’installer chez les personnes qui ont un usage régulier et intensif. Elle se manifeste le plus souvent par une envie intense de consommer pour se sentir bien, surmonter ses difficultés, décompresser, dormir, réaliser certaines activités, etc.
Facteurs d'influence
Le développement d'une addiction dépend de facteurs biologiques (hérédité, alimentation, etc.), psychologiques (perfectionnisme, insécurité, etc.) et sociaux (conflits, réseau social, etc.). Des difficultés au travail, comme des objectifs trop élevés, trop de responsabilités, conflits au travail, font partie des facteurs sociaux. Ces problèmes liés au travail peuvent être à l'origine d'un stress qui peut pousser à la consommation de substances psychoactives. Certains contextes de précarité professionnelle (fermeture d’entreprise, restructuration, etc.) ou le manque de soutien social peuvent aussi être à l’origine d’une addiction.
Critères de la dépendance La cinquième édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5-TR, 2022) définit 11 critères pour diagnostiquer une dépendance (substance use disorder): - consommation de la substance en plus grande quantité ou pendant plus longtemps que prévu
- vouloir réduire ou arrêter la consommation de la substance, mais ne pas y parvenir
- passer beaucoup de temps à se procurer ou à consommer la drogue et à se remettre des effets de sa consommation
- les fringales (craving) et l'envie de consommer la drogue
- le non-respect d'obligations importantes (à la maison, au travail ou à l'école) en raison de la consommation de substances psychoactives
- continuer à consommer même si cela cause des problèmes dans les relations interpersonnelles
- ne pas participer à des activités sociales, professionnelles ou de loisirs importantes en raison de la consommation de substances psychoactives
- continuer à consommer des substances, même si cela vous met en danger
- continuer à consommer même si l'on sait que cela cause ou aggrave des problèmes de santé
- avoir besoin d'une plus grande quantité de la substance pour obtenir l'effet désiré (tolérance)
- ressentir des symptômes de sevrage, que l'on peut soulager en consommant davantage de la substance
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Effets variables
Les effets du cannabis dépendent du dosage en substances actives présents dans le produit, du mode de consommation, de la condition physique du consommateur, de son humeur, de ses attentes et de sa personnalité, de l’environnement (favorable ou non) dans lequel il est consommé, de la fréquence et des habitudes de consommation de l’usager et des mélanges éventuels avec d’autres produits psychotropes.
Effets du cannabis
- Etat d’ébriété (altération de la vigilance, diminution de la concentration, excitation)
- Perte temporaire de mémoire
- Modifications de l’humeur (irritabilité, euphorie,…)
- Troubles des perceptions (vue, ouïe,..)
- Hallucinations visuelles, auditives et corporelles
- Troubles du mouvement, vertiges, détente musculaire, parfois somnolence
- Sécheresse de la bouche, blanc de l’œil rougi
- Hypoglycémie (diminution du taux de sucre dans le sang) et sensation de faim
- Effets cancérogènes avérés (voies aérodigestives supérieures et appareil respiratoire)
- Modification du rythme cardiaque et de la pression artérielle
- Troubles psychiatriques (paranoïa, sensations d’angoisse, schizophrénie,…)
- Mise à l’écart ou isolement (désocialisation)
Risques sur le lieu de travail
Outre les risques avérés pour la santé, la consommation de cannabis représente des risques de sécurité. L’altération de la vigilance, la modification de la perception du risque et/ou une prise de risque accrue peuvent ainsi être à l’origine d’accidents du travail.
Ceci est d’autant plus vrai pour des postes qui nécessitent une vigilance particulière, de la dextérité, une concentration soutenue ou encore des prises de décision rapides: conduite ou pilotage d’engins ou de véhicules, travail en hauteur, maniement ou utilisation de machines ou d’outils, contrôle de processus sur les sites à hauts risques… Or, plusieurs études mettent en évidence que les consommations de substances psychoactives seraient plus élevées ou plus fréquentes chez les personnes qui sont affectées à des postes à risque ou à fortes contraintes: tâches à haut risque (métiers de sécurité, transports, site à hauts risques industriels,…), métiers pénibles ou difficiles, postes à fortes responsabilités,…
Politique préventive en matière de cannabis
L'élaboration d'une politique n'est pas seulement une obligation légale, elle est aussi nécessaire pour rendre la question négociable, traiter les problèmes de fonctionnement et fournir des mesures de conseil aux employés qui luttent contre la dépendance.
La définition de mesures de prévention du risque de consommation de cannabis nécessite une approche collective qui s'inscrit dans la politique globale de prévention de l'entreprise. Pour ce faire, il est important de s'assurer d'un large soutien aux principes et aux objectifs de la politique. Vous pouvez y parvenir en définissant les mesures en concertation avec l'ensemble des travailleurs.
Points d'intérêt dans l'élaboration des politiques
Reconnaître des signaux ou indicateurs d’alerte
Il est important que chacun soit capable d’identifier les situations susceptibles de mettre en danger un salarié ou son entourage, suite à une consommation supposée de cannabis. Certains signaux peuvent permettre de repérer des personnes en difficulté (avant qu’il y ait mise en danger): absentéisme, baisse de performance, isolement, difficultés de concentration ou d’élocution, perte de vigilance, changement d’attitude, etc. Ces signaux ou indicateurs varient d’une entreprise à l’autre et peuvent être utiles pour évaluer l’impact de la démarche mise en œuvre.
Prévoir des formations
Il est utile de prévoir des formations à l’intention de la hiérarchie et des membres du service de santé au travail. Dans le premier cas, il s’agit d’aider les managers à déceler de manière précoce les situations problématiques parmi leurs collaborateurs et à aborder ce type d’abus avec eux au travers d’entretiens constructifs. Quant au second cas, il s’agit plutôt de les aider à développer une relation privilégiée qui favorise la résolution individuelle des problèmes de drogue.
Prévoir des relais extérieurs
Il est évident que les travailleurs confrontés à une consommation de cannabis devenue problématique ne seront pas toujours enthousiastes à l’idée d’aller se confier à une personne en interne, qu’elle soit la personne de confiance ou le médecin du travail. C’est pourquoi il est nécessaire de prévoir, à côté de la structure d’aide en interne, des relais extérieurs et de les faire connaître auprès des travailleurs. L’entreprise peut également prendre contact avec des organisations spécialisées en vue d’organiser des actions de formation ou de sensibilisation.
Sources/plus d'infos