Pourquoi?
Dispenser des conseils en matière de conformité fait partie des tâches du conseiller en prévention. N'étant pas lui-même responsable de la sécurité au travail, et par extension du "bien-être au travail", il doit avant tout donner des conseils, y compris sur la législation et la conformité de l’entreprise et de ses activités à cette législation.
Dans le cadre d'un système de gestion, il faut viser l'amélioration continue, pouvoir compter sur une mesure de référence et tenter d'éliminer les non-conformités.
En outre, les entreprises s'intéressent à la conformité légale par pure considération juridique: elles veulent être en mesure de démontrer qu’en cas de problème, elles n’ont aucun tort, sont de bonne foi et qu'elles ont tout mis en œuvre pour être en règle avec la législation en vigueur. L’intention n’est plus vraiment ici de viser l’amélioration continue, mais plutôt de pouvoir se "couvrir" si un accident ou un incident devait quand même se produire. Cela ne doit d’ailleurs pas forcément être vu de manière négative. Être en règle sur le plan juridique constitue bien souvent une première étape vers l’amélioration. Une étape dont le conseiller en prévention peut se servir pour travailler à l’essence de la législation sur le bien-être: un système de maîtrise des risques vraiment dynamique qui s'appuie sur une approche systématique selon le cycle plan-do-check-act.
Conforme à quelle législation?
Afin de pouvoir vérifier la conformité, il faut bien sûr savoir avec quelle législation il faut être en règle. La
loi du 4 août 1996 sur le bien-être au travail et les arrêtés d’exécution repris dans le
Code du bien-être au travail sont une base. Certains articles du
RGPT sont parfois encore d’application. Mais cela ne s’arrête pas là. D’autres législations doivent aussi être prises en considération, comme le
RGIE, la réglementation sur les machines, les conventions collectives de travail (CCT) (contraignantes, sectorielles, propres à l’entreprise), etc.
Dans nombre d’entreprises, la législation nationale ou régionale n’est en outre pas la seule qui compte. Il arrive que la maison mère impose des exigences spécifiques en termes de sécurité, de santé et d’environnement. Un système de gestion de la sécurité devra en en tenir compte car il ne se limite pas au simple aspect juridique. En revanche, s'il s'agit de conformité légale au sens littéral du terme, cela ne concerne que la conformité avec la législation en vigueur.
Approche systématique
Pour vérifier si une entreprise est en règle avec la législation en vigueur, il faut appliquer une approche systématique. Cela permet de conserver une bonne vue d’ensemble, tout en respectant l’esprit de la législation sur le bien-être au travail. L’employeur doit en effet procéder de manière systématique, par exemple pour mettre en place une stratégie d’analyse des risques structurée. Pour démarrer un contrôle de conformité légale, il vaut mieux procéder par étapes.
Procéder par étapes
On peut répartir ces étapes en deux grands groupes: créer une méthode et l’appliquer.
Dans une première phase, il faut se pencher sur la manière de procéder, définir les limites et l’objectif visé (étapes 1 à 4). Ce n’est qu’une fois ces éléments déterminés que l’on peut effectivement appliquer le système (étapes 5 et 6). Cette méthode de travail, éventuellement accompagnée d'une procédure pour garantir les résultats sur le long terme, offre les meilleures garanties de parvenir à un résultat complet et cohérent.
Méthode
Pour définir la méthode à appliquer, on peut se baser sur quatre questions:
- Étape 1: quelle est la législation pertinente?
- Étape 2: à quel niveau l'appliquer dans l’entreprise?
- Étape 3: quand peut-on dire que quelque chose est conforme à la législation?
- Étape 4: comment transposer les réponses à ces questions en un plan d’action?
Étape 1
Cette première étape comprend deux parties:
- il faut s'assurer d'avoir réuni toute l'information sur la législation à respecter. Mais comment savoir tout ce qui existe en la matière?
- comment vérifier la pertinence de la législation en question? Et à quel niveau?
Cette étape se concentre uniquement sur la méthode (il ne s'agit donc pas encore à passer à l’analyse proprement dite). Voici quelques exemples de questions que vous pourriez vous poser: comment savoir s’il existe une législation sur l’ombre portée des éoliennes? Comment savoir s’il existe une réglementation sur un certain type de verre?
Même si vous recourez à des spécialistes, parcourez les informations sectorielles, vous adressez à votre service externe, vous n'aurez pas la certitude absolue que vous avez pensé à tout. C’est pourquoi cette phase est importante: vous devez avoir une méthode pour être aussi complet que possible.
Une fois que vous vous serez approché au plus près de cet objectif, vous pourrez savoir si la réglementation s’applique à votre entreprise. S’il n’y a, par exemple, pas de travail de nuit, vous pouvez indiquer que la loi à ce sujet est "non applicable".
Le but est aussi de convenir quand quelque chose est d’application. Posez le problème ainsi:
- Jusqu’à quel niveau de détail allez-vous aller? Si la question de savoir si un règlement est d’application se pose, allez-vous répondre par "oui/non" ou plutôt par "oui/parfois/presque jamais/non"?
- À quel niveau souhaitez-vous positionner? Au niveau d’un titre du Code du bien-être au travail, d’un titre, d'un livre, d’un article?
Attention: Pensez à toute la législation potentiellement d’application. Même s’il n’y a pas de travail de nuit dans votre entreprise, reprenez ce sujet dans la liste, sous "non applicable". Cela vous permettra aussi de réagir plus rapidement si la situation devait un jour changer dans votre organisation.
Étape 2
Au cours de l’étape suivante, vous définissez quelle partie de l’entreprise est concernée. Tout comme pour une analyse des risques, vous pouvez vérifier la conformité à la législation au niveau de l’entreprise, d’un (groupe de) poste(e) de travail ou de l’individu.
Combinée avec la première étape, cette étape vous donnera une matrice avec, sur un axe, la partie de l’entreprise concernée par le contrôle de la conformité à la législation et, sur l’autre axe, la législation que vous comptez évaluer.
Étape 3
Dans une législation sur base d’objectifs, comme le Code, il y a place pour l’interprétation. La législation de base sur le bien-être au travail n’est pas strictement déterminante: elle donne plutôt des directions. C’est pourquoi il est important de définir à l’avance ce que vous entendez par "conforme". Quand l’entreprise est-elle conforme à la législation? Si vous évaluez à l’aide d’une échelle oui/non à un niveau élevé (p.ex. un Livre du Code), le résultat sera souvent décourageant. Il arrivera en effet fréquemment que l’entreprise ne soit pas en règle avec un article ou une petite partie de la législation, mais qu'elle soit en règle pour le reste. Dans ce cas, la méthode choisie est trop stricte. Vous ne pouvez pas allez voir le comité de direction en lui apportant le message défaitiste selon lequel l’entreprise ne satisfait pas à un Livre entier du Code. Essayez donc d’adopter une approche réaliste. Si vous souhaitez évaluer à un niveau plus élevé, travaillez au besoin avec des pourcentages. Vous pouvez par exemple être "conforme" à 80% pour toute l’entreprise ou à 75% pour un département.
Mettez vous d'accord à l'avance sur le sujet. De cette façon, chacun disposera du même cadre de référence, ce qui facilitera l’élaboration de plans d’action.
Étape 4
Tout comme dans le cadre d’une stratégie de gestion des risques, vous avez couvert tous les départements et personnes concernées. Vous avez en outre rassemblé toute la législation et l’avez évaluée en termes de pertinence. Pour finir, vous avez défini une méthode pour évaluer correctement la conformité avec la législation et poser des priorités dans la foulée.
Ce que vous définirez comme écarts graves ou moins graves doit être clair. Votre objectif est évident pour le court terme: éliminer les écarts graves. D’autres éléments pouvant jouer un rôle dans la définition des priorités sont liés à d’éventuels investissements, à une résistance émotionnelle au changement, etc.
Mieux vaut intégrer ces priorités dans le plan d’action annuel (PAA) et le plan global de prévention (PGP). Il s’agit d’instruments légaux, qui sont au cœur de votre système dynamique de gestion des risques (SDGR). Il n’est pas nécessaire de prévoir de nouveaux instruments de suivi pour la conformité légale.
Application
Les deux dernières étapes concernent l’application concrète de la méthode élaborée au cours des étapes précédentes. Dans l’étape 5, la méthode est appliquée aux textes légaux concrets. L’étape 6 concerne l’élaboration d’une procédure pour un suivi continu.
Étape 5
Après voir suivi correctement les étapes précédentes, nous arrivons à cette étape-ci qui consiste à mettre la théorie en action. Examinez si la législation est applicable et évaluez sa conformité dans l’entreprise. Pour finir, définissez les priorités dans le PAA et le PGP.
Étape 6
Comme pour une analyse des risques, la vérification de la conformité d’une entreprise à la législation en vigueur est un instantané qui ne tient pas compte des circonstances changeantes. La législation ou l’entreprise peut changer. Il suffit qu’une équipe de nuit soit introduite pour que vous deviez à nouveau refaire votre première étape et vérifier si une autre législation s’applique. Un nouveau poste de travail peut avoir pour conséquence qu’une entreprise ne soit plus conforme à certains articles de la législation.
Une procédure de suivi doit être mise en place. La nouvelle législation* et les changements internes doivent être suivis de près et vous inciter à réévaluer votre legal compliance. De même, pour le SDGR, toute modification doit toujours conduire à une nouvelle analyse des risques. C’est pourquoi il peut être judicieux de lier d’emblée la conformité légale à l’actualisation de l’analyse des risques.