Établir un plan de communication des risques
Qu’est-ce que la communication des risques?
Vous avez dressé l’inventaire des risques auxquels votre entreprise est confrontée. Se pose alors la question de savoir s’il faut communiquer au sujet de ces risques et établir un plan de communication. On parle de communication des risques lorsque vous communiquez sur les risques potentiels liés à votre entreprise ou à vos activités.
La communication des risques est un processus interactif d’échange d’informations et d’opinions entre des individus, des groupes et des institutions (publiques) sur les risques auxquels les personnes sont exposées avant qu’une catastrophe ou un incident n’ait lieu. Cela ne concerne pas seulement les risques eux-mêmes mais également les inquiétudes, les conceptions et les réactions liées aux risques et la manière dont les intéressés gèrent les risques.
Lorsque vous communiquez sur les risques, vous dites à votre public à qui il peut s’adresser s’il arrive quelque chose, ce qu’il doit faire et par quels canaux vous communiquerez avec lui en cas de crise.
L’exemple le plus évident de communication des risques est probablement celui des instructions données par l’hôtesse de l’air lorsque vous montez à bord d’un avion, instructions que vous retrouvez également sous forme de pictogrammes sur un dépliant. Mais il y en a d’autres, comme les communications émanant des autorités lors d’une vague de chaleur, la diffusion d’informations et de pilules d’iode aux riverains d’une centrale nucléaire ou les campagnes de dépistage du cancer du sein ou du colon. Sans oublier les informations concernant les sorties de secours en cas d’incendie dans les bureaux de votre entreprise.
Grâce à une bonne communication des risques, vous préparez votre public à une crise éventuelle. Il saura mieux comment réagir dans les heures qui suivent un incident s’il connaît les risques liés à votre activité et s’il sait comment vous communiquerez en cas de catastrophe. Vous lui donnez les moyens de se protéger et de ce fait, il cèdera moins à la panique le moment venu. Vous engagez un dialogue avec vos groupes-cibles et leur permettez ainsi de comprendre vos activités et d’avoir confiance. Vous montrez que vous faites tout ce qui est en votre pouvoir pour limiter les risques, que la sécurité est votre priorité absolue et que votre organisation ou entreprise est préparée à une situation d’urgence.
En communiquant sur les risques, vous souhaitez susciter la confiance et montrer de la bienveillance à l’égard de vos parties prenantes. Vous souhaitez améliorer les connaissances des citoyens concernant les risques de votre entreprise. Mais comme toute médaille a son revers, vous pouvez également susciter l’inquiétude. L’efficacité de la communication des risques est donc une question d'équilibre: il s’agit de donner suffisamment d’informations et de stimuler l’autonomie tout en évitant de semer l’inquiétude parmi les citoyens, le personnel et les parties prenantes.
La communication des risques est-elle indispensable pour tout le monde?
Communiquer sur les risques n'est pas forcément une nécessité pour toutes les organisations, ce n’est parfois même pas dans leur intérêt, mais elles devraient toutes étudier la question. Comment savoir si vous devez communiquer sur les risques? Il s’agit de bien examiner si le risque auquel vous êtes confronté est suffisamment important pour justifier que des personnes en soient informées au préalable. L’objectif de la communication des risques est d’instaurer une confiance partielle sur ce qui se passera en cas de crise, à l’aide de procédures et de directives. Et donc d’avoir essentiellement un effet rassurant et de susciter un sentiment de sécurité.
Pour une école, il peut être conseillé par exemple d’informer les parents par courrier ou via les médias sociaux des mesures qui seront prises si un incident survient pendant un voyage scolaire ou en classe de neige, ou si un incendie se déclare à l’école. Vous pouvez dire aux parents que vous ferez régulièrement le point sur la situation sur la page Facebook de l’école. Si les enfants partent en classe de neige, vous pouvez adresser une lettre aux parents pour leur fournir diverses informations, comme par ex. l’hôpital à contacter à l’étranger en cas d’accident ou le déroulement du rapatriement si un enfant se casse une jambe.
Les producteurs de denrées alimentaires et fabricants de peintures communiquent également sur les risques: les étiquettes des denrées alimentaires donnent des instructions en cas de problème concernant le produit, tandis que les pots de peinture mentionnent le numéro du centre antipoisons ainsi que les instructions nécessaires en cas d’incident.
La communication des risques indique où trouver des informations utiles en cas de crise. Un site, un numéro de téléphone, des informations dans les médias locaux peuvent être des instruments utiles. Une bonne communication des risques constitue la base d’une bonne communication de crise.
Votre décision de communiquer ou non sur les risques de votre organisation peut aussi fortement dépendre de l’actualité. Si par exemple plusieurs accidents de cars scolaires se sont produits récemment, les parents de vos élèves seront plutôt inquiets. “Mon enfant part aussi en voyage, que fera son école si un accident survient?” Anticiper ce type de questions est aussi une forme de communication des risques. Vous informez les parents: si quelque chose devait arriver, nous vous informerons par le biais de tel canal, nous organiserons l’assistance et le secours en tel lieu, nous rassemblerons les parents à tel endroit… Savoir comment l’école réagira en cas d’accident peut être très rassurant pour les parents qui voient leur enfant partir en voyage.
La communication des risques est utile pour de nombreuses grosses entreprises, par ex. les centrales nucléaires ou les entreprises chimiques. Mais elle peut aussi présenter un intérêt pour une PME souhaitant informer son personnel de ce qui se passera en cas d’accident du travail, d’incendie ou de problème sur une ligne de production.
Enfin, ajoutons que la réflexion sur les menaces potentielles aboutit presque automatiquement à une sorte d’attitude sécuritaire et de culture de la sécurité. Les travailleurs prennent davantage conscience de leur rôle et de leur propre responsabilité en matière de sécurité. Ils hésiteront moins à signaler les incidents et prendront plus rapidement leurs responsabilités si quelque chose se produit.
Que met-on dans un plan de communication des risques?
Si vous avez décidé de communiquer sur les risques de votre entreprise, il est conseillé d’élaborer un plan de communication des risques. Le grand avantage de la communication des risques est que vous pouvez déployer toutes vos activités de communication concernant les risques de votre entreprise en toute sérénité. Contrairement à la communication de crise, vous n’êtes pas sous pression lorsque vous communiquez.
Un bon plan de communication des risques s’intéresse à 4 aspects:
1. Quel message devez-vous faire passer?
Sur quels risques identifiés est-il bon de communiquer? Établissez un top 10. Quels sont les risques les plus importants? Quels sont les risques les plus susceptibles de nuire à l’image de l’entreprise? Quelle est la probabilité que ce type de crise se produise réellement?
Pour chacun des risques, déterminez ensuite le message que vous souhaitez communiquer. Qu’allez-vous dire et ne pas dire? Est-il nécessaire de prévoir une formation, par exemple sur les procédures que vous suivrez si une situation d’urgence survient?
Dans la brochure “Les ondes de mon GSM en questions... et réponses”, Belgacom, Mobistar et Base communiquent sur les risques associés ou non à l’utilisation du GSM et ceux liés à la présence d’une antenne aux alentours. Cette brochure souligne l’absence de preuves scientifiques démontrant que le rayonnement influerait négativement sur la santé, mais informe aussi les utilisateurs sur l’exposition aux ondes de la téléphonie mobile et sur les manières de réduire cette exposition.
Particulièrement informative, la brochure explique comment une antenne à proximité de votre maison contribue à un meilleur réseau, réduisant ainsi le rayonnement émis par votre GSM. Elle va droit au but et rassure le lecteur. Exactement ce que doit faire une bonne communication des risques!
Lors de l’assainissement des terrains industriels de Total à Evergem (dans le cadre du décret flamand de 2006 relatif à l’assainissement du sol), l’on a trouvé des bombes datant de la Seconde Guerre mondiale qui devaient être enlevées par des sociétés spécialisées. Les autorités ont informé bien à l’avance les riverains et entreprises des alentours sur les risques potentiels, et les ont préparés à une évacuation. Elles leur ont adressé une lettre accompagnée d’un plan d’évacuation, ont organisé des réunions d’informations, ont mis en place une ligne d’information et ont adapté le site web de la commune. La lettre abordait en détail les raisons de l’assainissement et expliquait les différentes phases du projet. Par le biais de questions et réponses formulées de manière très concrète, les riverains apprenaient comment une évacuation se déroulerait dans la pratique.
Tout comme la brochure sur le rayonnement, ceci constitue un bel exemple de communication des risques. Les autorités ont guidé les riverains du terrain industriel à travers les différentes étapes de l’assainissement, ont appelé les risques par leur nom et ont opté pour une approche claire, proactive, avec des informations précises et concrètes.
2. Quels canaux allez-vous utiliser pour votre communication des risques?
Contrairement à la communication de crise, où les médias s’intéresseront de toute manière à votre situation de crise, vous dépendez, pour votre communication des risques, de ce que nous appelons les ‘owned media’. Il s’agit de vos propres canaux de communication, comme par ex. votre site, votre page Facebook ou le magazine interne destiné au personnel. Voici quelques canaux que vous pouvez utiliser pour votre communication des risques:
● votre site
● vos canaux de médias sociaux: Facebook, Twitter, YouTube…
● une édition spéciale de votre magazine du personnel
● l’e-mail
● l’intranet
● une réunion
● une lettre de la direction
● le système d’annonce de votre entreprise
● une affiche
● une brochure
● une lettre, par ex. aux parents d’élèves
● une foire aux questions (faq).
Dans ce type de communication, les informations ne doivent pas directement sauter aux yeux du lecteur, mais celui-ci doit pouvoir les trouver rapidement et facilement. Par exemple via une fonction de recherche sur votre site. Veillez par ailleurs à ce que la communication sur les risques de votre organisation n’attire pas trop l’attention. Réfléchissez donc bien aux canaux de communication que vous allez utiliser. Les canaux connus sont ceux qui fonctionnent le mieux: votre public sait que vous communiquez par cette voie et leur effet est éprouvé.
Chaque été, des centaines de milliers de fans de musique participent à des festivals pour une journée ou un week-end d’amusement, de musique et de plaisir entre amis ou en famille. Un festival doit avant tout être quelque chose d’agréable, mais il n’est pas exclu qu’un incident y survienne également. Il suffit de se rappeler la tempête qui a frappé de plein fouet le Pukkelpop en 2011. Si le site de votre festival doit mettre l’accent sur l’amusement, il est bon qu’un volet soit consacré aux risques possibles.
Le site web de Rock Werchter, par exemple, ne communique pas de manière visible sur les risques possibles, mais une fonction de recherche permet de trouver des informations expliquant le déroulement des opérations si le terrain doit être évacué. Surfez sur www.rockwerchter.be et recherchez le terme ‘évacuation’.
La section ‘infos pratiques’ fournit en outre des informations concernant les premiers secours sur le terrain, la sécurité et la manière dont les organisateurs s’efforcent de garantir celle-ci par la mise en place des couloirs de sécurité. Les organisateurs sensibilisent également les visiteurs à la question de la protection de l’ouïe et à l’importance de porter des bouchons d’oreilles pour prévenir les dommages auditifs. Il s’agit là encore de communication des risques.
De même, le Pinkpop profite de son site web www.pinkpop.nl pour informer les festivaliers (et leurs parents) des incidents susceptibles de se produire et des mesures prises afin de les éviter. Le règlement intérieur indique que des caméras ont été placées sur le terrain afin de dissuader les pickpockets, que la police est présente pour effectuer des contrôles sur le trafic de drogues, qu’il est interdit de fumer dans les bâtiments, chapiteaux ou sous les auvents, et que toute personne allumant un feu sera expulsée du terrain. Tout le monde ne lira pas ce règlement avant de se rendre au festival, mais quiconque cherche ces informations pourra les trouver. En revanche, le site du Pinkpop ne contient malheureusement pas de fonction de recherche qui permettrait de trouver plus facilement ces informations.
Si la communication des risques est assurée correctement par l’organisateur du festival, elle n’effraiera pas le lecteur mais aura plutôt un effet rassurant. Ne négligez donc pas la communication des risques, même si votre événement est avant tout axé sur le plaisir. Vous pouvez l’intégrer par exemple sous la rubrique des questions fréquemment posées (faq). Sur le site d’un parc d’attractions, l’on peut prévoir une rubrique qui indique ce qu’il faut faire en cas de situation d’urgence, si on a perdu son enfant, ou qui explique la procédure à suivre en cas de problème sur une attraction.
3. Qui devez-vous informer sur les risques de votre organisation?
Établissez une liste de toutes les personnes que vous souhaitez ou devez informer concernant vos risques. Quels groupes-cibles internes ont intérêt à savoir quels risques votre entreprise ou activité entraîne et comment vous les gérez? Et quels groupes-cibles externes? Pour chaque risque, définissez les groupes-cibles concernés. Vous préparerez ainsi déjà en partie votre communication de crise ultérieure.
Les groupes-cibles internes peuvent être:
● la direction
● les travailleurs
● les syndicats
● le service juridique / les avocats
● les délégués syndicaux
● les secouristes de l’entreprise
● le service incendie de l’entreprise
● votre siège ou société mère
● les autres sites de production
● les visiteurs
● les sous-traitants qui travaillent dans votre entreprise
● …
Les groupes-cibles externes peuvent être:
● les consommateurs et clients
● les fournisseurs et distributeurs
● la presse
● les riverains
● les autres entreprises aux alentours
● les instances de contrôle (p. ex. l’inspection du travail, le service Environnement,…)
● la police, les pompiers
● les actionnaires
● votre organisation sectorielle
● …
4. Comment votre public réagit-il à la communication de crise? Comment allez-vous suivre les réactions qu’elle va peut-être susciter?
Votre communication des risques peut provoquer des réactions parmi vos différents groupes-cibles. En apprenant ce qui peut se passer, votre public peut s’inquiéter, s’interroger ou avoir peur. Vous pouvez surveiller ces réactions via les médias sociaux, mais il se peut aussi que des parents inquiets suite à la communication des risques de l’école appellent le directeur, envoient une lettre ou informent les médias locaux.
Surveiller de près les éventuelles réactions et émotions suscitées par votre communication des risques est crucial. Gardez un œil sur la manière dont votre communication est accueillie et effectuez les ajustements nécessaires. Occupez-vous des questions éventuelles et formulez une réponse adaptée. Si vous ne le faites pas, les réactions ou émotions de votre public pourraient devenir disproportionnées ou donner lieu à la panique. Essayez de gagner la confiance de votre public. Expliquez pourquoi vous communiquez sur les risques. Votre public doit savoir quels sont les risques associés à votre entreprise ou activité tout en ayant confiance en votre capacité à réagir en bon père de famille en cas de danger.
Conseils:
● Une bonne communication des risques est une question d’équilibre: il s’agit de donner suffisamment d’informations et de stimuler l’autonomie tout en évitant de semer l’inquiétude parmi les citoyens.
● La communication des risques indique où trouver des informations utiles en cas de crise.
● Pour chaque risque, déterminez le message que vous souhaitez communiquer.
● Déterminez via quels canaux vous allez communiquer et définissez vos groupes-cibles.
● Surveillez bien la manière dont votre public réagit à la communication des risques afin d’éviter la panique.
A propos de l’auteur: Jeroen Wils est expert en communication de crise et co-propriétaire de l’agence de communication Bepublic (Louvain).